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Mémoire sur l’industrie cinématographique canadienne soumis par l’Association of Motion Picture Producers and Laboratories of Canada au gouvernement canadien octobre 1959 (extraits)

Résumé

L’ONF ne confie pas beaucoup de travail à l’entreprise privée, même pour les films commandités par le gouvernement. Parfois l’Office justifie cette politique par des raisons d’économie. Si l’on prend en considération le coût de toutes les activités de l’Office, on constate que c’est un faux prétexte. Il est de l’intérêt national qu’il existe une saine compétition — État vs entreprise privée — ne serait-ce que comme contrôle sur une vaste activité subventionnée par l’État. Donc l’Office devrait confier à l’extérieur une part importante de ses travaux, particulièrement les commandites des ministères. Sans contredit l’Office devrait éviter de produire des films qui pourraient restreindre le marché des producteurs commerciaux.

La production des films pour les ministères

Nous croyons qu’il n’était pas prévu à l’origine que l’Office soit le seul producteur des films du gouvernement et que seuls ses laboratoires s’en occupent…. Ces dernières années, à l’exception de la période où il est déménagé à Montréal, l’Office a commandé peu de films originaux à l’entreprise privée, que ce soit de ses propres films ou des commandites pour les ministères. Durant l’année fiscale 57-58, les producteurs commerciaux n’ont même pas produit un seul film pour le gouvernement fédéral. Durant la même période, l’ONF a tourné 129 nouveaux films, dont 26 en commandite, principalement pour le gouvernement du Canada… L’Office reçoit environ $1 million chaque année de ses ventes aux différents ministères, sans compter les sommes que lui vote le parlement pour ses propres productions et ses ventes commerciales.

Versions doublées et révisées

Les rapports de l’Office indiquent que plusieurs versions révisées ou doublées ont été confiées à l’entreprise privée. Toutefois c’est du travail au rabais à comparer à ce que représente un film original.

Une infime fraction des dépenses de l’Office pour ses films ou pour les commandites a été effectuée dans l’industrie privée du cinéma. Pour les trois années prenant fin le 31 mars 1958, à peine 3 % de toutes les dépenses allaient à la réalisation. À cela s’ajoutent $550,000 pour divers travaux, principalement de laboratoire. Cela totalise donc 6 % de toutes les dépenses de l’ONF.

L’industrie privée et la production de l’ONF

Parmi les propres films de l’Office on retrouve des films industriels et c’est à ce sujet qu’ont éclaté les plus importants conflits entre l’Office et les cinéastes indépendants. Ceux-ci croient que l’Office réalise des films qui relèvent de la compétence des compagnies indépendantes et commerciales.

Les films de l’Office présentés à la télévision

Une bonne partie du programme de l’ONF consiste en des films destinés à la télévision… Aucun producteur commercial ne peut concurrencer avec de tels prix pour des documentaires. Il est évident que l’Office peut justifier la vente de ses films télévision à la CBC à un prix inférieur au coût de production parce que ces films sont aussi distribués ailleurs qu’à la CBC. Nous croyons qu’une plus grande proportion de ces films télévision devrait être confiée à des producteurs privés.

Les « subventions cachées » des activités de l’Office

Ces dernières années le parlement a voté pour plus de $4 millions de crédits à l’Office. À cela s’ajoute qu’on lui fournit un édifice complexe et coûteux ($6.2 millions au mois de mai 58) pour lequel il ne paie ni loyer, ni chauffage, ni électricité, ni entretien et qu’on lui donne du matériel et de l’équipement qui ne lui coûte ni dépréciation, ni intérêts. Ces avantages valent au bas mot $ 1 million par année. En d’autres mots l’Office reçoit une subvention déguisée d’environ 15 % de ses frais d’opération. Et en plus il ne paie pas de taxes d’affaires.

On dit souvent qu’il est plus économique pour l’Office de produire lui-même des films que de faire appel à l’industrie privée. Souvent cela n’est vrai qu’en apparence car on néglige les subventions déguisées… Nous croyons que l’entreprise privée pourrait prendre en charge une bonne partie de la production de l’Office à coût comparable si seulement on incluait ces subventions cachées dans ce que cela coûte à l’Office

L’intérêt national et l’industrie privée du cinéma

D’après la loi actuelle, il est de l’intérêt national que l’Office confie du travail à l’extérieur pour les raisons suivantes :

  1. L’intérêt général du Canada réside dans un système basé sur l’entreprise privée.
  2. Il est d’une importance capitale qu’existe une forte compétition au plan de la qualité et de l’économie pour que cela serve à contrôler les activités cinématographiques gouvernementales.
  3. Il est important de fournir une quantité de travail raisonnable à l’entreprise privée pour lui permettre de se développer elle-même. La commandite gouvernementale est un des moyens les plus importants pour assurer un niveau minimal de production privée.

Conclusions

Tout en reconnaissant toutes ces valeurs (haute qualité, prestige, etc.) il n’en demeure pas moins que les multiples activités de l’Office constituent un frein majeur sur la route du succès sur laquelle se sont finalement engagés les cinéastes commerciaux. Nous ne pouvons accepter que notre gouvernement soit notre concurrent dans notre propre domaine. Comme c’est le cas avec l’équipe de la CBC nous sommes obligés d’entrer en concurrence avec une institution financée par les contribuables, donc en partie par nos taxes. Nous protestons vigoureusement contre cette situation…

(Traduit de l’anglais)